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Selon des statistiques fournies par YouTube en octobre 2017, «8 français sur 10 entre 16 et 24 ans vont sur YouTube au moins une fois par jour» (chiffres YouTube Brandcast 2017 : www.blogdumoderateur.com/chiffres-youtube). Il suffit de sonder une classe de collège ou de lycée pour mesurer la popularité de cette plateforme et des youtubeurs auprès des élèves. Mais si toutes les vidéos sont consultables gratuitement, leur production a nécessairement un coût. Les youtubeurs et les sociétés de production se financent grâce à la publicité. Encore faut-il que l’utilisateur la visionne. Voilà pourquoi la publicité se fait de plus en plus discrète.

Fiche ressources, parue dans le Dossier de la Semaine de la presse, 2018

Objectifs

  • Développer l’esprit critique des élèves.
  • Susciter des réflexes de vérification des sources.
  • Distinguer les différents types de vidéos publiées sur YouTube.

DÉROULEMENT

Malgré une réglementation assez claire sur la nécessité de signaler un contenu publicitaire (l’article 20 de la loi du 21 juillet 2004 précise que «Toute publicité doit pouvoir être clairement identifiée comme telle»), il est encore relativement difficile de repérer une publicité cachée sur YouTube. L’absence de signalétique ne permet pas toujours de savoir si une vidéo contient un placement de produit ou a été financée directement par une marque. Pour préparer sa séance, l’enseignant devra donc bien sélectionner les différentes études de cas. Les exemples cités dans cette fiche ont été étudiés dans le cadre de nos ateliers Déclic’Critique avec des élèves de cycle 3 et de cycle 4.

Faire prendre conscience des différentes informations qui accompagnent une vidéo

Pour réussir à identifier la nature exacte d’une vidéo publiée sur YouTube, il est nécessaire de sensibiliser les élèves aux différentes informations disponibles autour de la vidéo. Le titre, le nom de la chaîne, le nombre de vues et les suggestions de vidéos supplémentaires sont généralement assez vite repérées. En revanche, les informations disponibles au bas de la vidéo, en cliquant sur le bouton «Plus», sont la plupart du temps ignorées. Or, c’est souvent à cet endroit qu’un youtubeur mentionne le nom d’un co-producteur.
Exemple avec la vidéo de Cyprien sur le jeu vidéo les SIMS2
Vidéo de Cyprien

Après avoir demandé aux élèves leur impression à la suite du visionnage de la vidéo, demandez leur de regarder les informations qui y figurent : titre de la vidéo, nombre de vues, titre de la chaîne, suggestions d’autres vidéos... Mais c’est seulement en cliquant sur le bouton «Plus», au bas de la vidéo, qu’ils verront la liste de l’équipe technique et la mention: «Avec la participation d’Electronic Arts».

1 Chiffres YouTube Brandcast 2017 : www.blogdumoderateur.com/chiffres-youtube

2 Les SIMS vs la vie, YouTube : www.youtube.com/watch?v=zdFJaDm8sui

Electronic Arts est le producteur du jeu vidéo. il a donc cofinancé cette vidéo, qui peut ainsi être considérée comme une publicité, c’est-à-dire un contenu cherchant à vanter les mérites d’un produit ou à faire connaître une marque.

Faire acquérir des réflexes de vérification

Après cette première sensibilisation aux informations annexes d’une vidéo YouTube, demandez aux élèves, répartis par petits groupes, de lister toute une série de questions permettant de vérifier la nature exacte d’une vidéo. Lors de la restitution collective, un certain nombre de questions est censé émerger : Qui a publié cette vidéo ? Quel est ce type de contenu ? Est-ce un tuto ? Une parodie ? Une interview ? Un montage d’extraits vidéos ? Un clip ? Une démonstration de jeux vidéo ? Une publicité ? Sur quelle chaîne YouTube la vidéo a-t-elle été postée ? Pourquoi le youtubeur a-t-il réalisé sa vidéo ? Des marques sont-elles apparentes ?
Lorsque cette phase de restitution est terminée et qu’une liste de questions-type a été établie, montrer aux élèves différents types de vidéos YouTube pour qu’ils puissent eux-mêmes vérifier la nature exacte de ce qu’ils regardent : extrait de JT, reportages, tuto... et inclure dans ce panel différentes formes de publicité cachée. Car s’il est nécessaire de faire acquérir ces réflexes de vérification, il n’y a pas de recette transposable sur chaque vidéo.
illustration avec deux cas très différents.

Le clip sponsorisé

La chanteuse Louane publie de nombreux clips sur sa chaîne YouTube.
La chanteuse Louane

Elle a également tourné une reprise de Love-fool des Cardigans pour le compte d’une marque de cosmétique.

La chanteuse Louane

La vidéo3, intitulée «Clip Colorshow», a été publiée sur la chaîne YouTube de la marque, et de nombreux produits de maquillages apparaissent dans les scènes. Mais la mise en scène est trompeuse : rien n’indique formellement qu’il s’agit d’une publicité. Seule la présence de la marque et le nom de la chaîne YouTube sous-entend bien qu’il s’agit d’une publicité... vue plus de 3 millions de fois.

3 Clip «.Colorshow.» : www.youtube.com/watch?v=1TIiuT4Tw6Y

Vidéo sponsorisée à la signalétique obscure

La publicité n’est pas forcément cachée mais elle peut être discrète. Par exemple, sur la chaîne YouTube Cyprien Gaming, on peut voir une vidéo de démonstration du jeu «Horizon Zero Dawn» par deux youtubeurs, Cyprien et Squeezie. Cette vidéo a été vue plus de 950.000 fois4. Une simple vidéo de démo? Pas tout à fait. La mention «inclut une communication commerciale» s’affiche pendant les 20 premières secondes de la vidéo.

La chaîne YouTube Cyprien Gaming

4 Vidéo «Horizon Zero Down», Cyprien Gaming : www.youtube.com/watch?v=t0Y_5bPG4xY

Depuis 2016, YouTube a en effet ajouté une fonctionnalité permettant aux youtubeurs d’indiquer qu’une vidéo est un contenu sponsorisé. Seulement, le vocabulaire choisi «communication commerciale» n’est pas forcément très clair pour des élèves de collège comme nous avons pu le constater auprès d’élèves de quatrième.
Faire acquérir ces réflexes de vérification, en travaillant sur ces différents formats publicitaires présents sur YouTube est indispensable, car à partir du moment où la nature même du message est cachée, ce type de pratique est une forme de désinformation.

PROLONGEMENTS

Le modèle économique des youtubeurs

Une fois cette sensibilisation effectuée avec les élèves, il est possible d'étudier, en classe, le modèle économique des youtubeurs. Car s'ils gagnent de l'argent par le système de publicité de Google, les vidéastes les plus importants travaillent au sein d'agences baptisées MCN (pour «multi-channel networks») ou réseaux multi-chaînes. Ces agences gèrent les revenus des youtubeurs : véritables régies publicitaires, les MCN négocient avec les annonceurs pour les publicités diffusées avant les vidéos mais aussi pour les autres formes de publicités comme les contenus sponsorisés (c'est-à-dire payés par une marque) ou les placements de produit (technique consistant à promouvoir un produit dans un programme télévisé, un film ou une vidéo sur Internet). Ces MCN gèrent également la carrière d'un youtubeur en l'aidant dans la création de contenus et le développement de son audience.
De grands groupes médias ont investi sur le Web en créant ou en rachetant des MCN : Canal.+ détient Studio Bagel, M6 possède Golden moustache et Rose Carpet, TF1 a créé l'agence Finder Studios. Mais c'est le groupe Webedia, spécialisé dans le numérique, qui a fait la plus grosse affaire en rachetant mixi.com, le MCN des plus gros youtubeurs français (Cyprien, Norman et Squeezie totalisant, à eux trois, 29 millions d'abonnés en 2017).
En classant les youtubeurs en fonction de leur appartenance à des grands groupes, les élèves peuvent ainsi mieux appréhender l'univers médiatique qui les entoure.

Ressources

Sébastien Rochat, responsable du Pôle Studio du CLEMI

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