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Qui dit élections, dit sondages. Mais comment s’y retrouver dans la profusion de chiffres qui, chaque jour, alimentent les commentaires politiques ? Quelques conseils pour les comprendre et les interpréter.

Un sondage doit être représentatif

Un questionnaire réalisé par un média auprès de ses lecteurs ou des questions posées à la volée sur les réseaux sociaux ne répondent pas aux exigences de ce que doit être un sondage d’opinion. Leur principal problème est qu’ils ne sont pas représentatifs. « Un sondage est, quelle que soit sa dénomination, une enquête statistique visant à donner une indication quantitative, à une date déterminée, des opinions, souhaits, attitudes ou comportements d’une population par l’interrogation d’un échantillon. »
C’est ainsi que les définit la loi du 19 juillet 1977, qui encadre aussi la manière dont ils peuvent être diffusés par les instituts qui les réalisent (les principaux sont l’IFOP, Ipsos, CSA, BVA et TNS Sofres).

En France, la plupart des sondages reposent sur la méthode des quotas : on essaye de reproduire une « petite France », l’échantillon, à qui on pose des questions. Cette « petite France » compte environ la même proportion d’ouvriers, de Parisiens, de femmes, d’électeurs du Rassemblement national, etc., que la population française, permettant d’estimer leur opinion, parfois en ajustant les chiffres, en fonction des personnes interrogées et de biais déclaratifs connus (des sondés qui n’osent pas déclarer la vraie nature de leur vote, par exemple). C’est ce qu’on appelle « redresser » l’échantillon.

Tenir compte de la marge d’erreur

Plus l’échantillon est important, plus la marge d’erreur est réduite. Par exemple, sur un échantillon de 800 personnes (souvent utilisé par les sondeurs qui partent de 1000 personnes et ne gardent que ceux qui disent vouloir voter), les scores sont estimés avec une marge d’erreur de 1,4 points à 3,5 points, en fonction du score. Cela signifie que lorsqu’on lit que deux candidats sont respectivement à 29 % et 27 % dans un sondage d’intentions de vote, il y a 95 % de chances que le score de l’un soit entre 25,8 % et 32,2 % et celui de l’autre entre 23,8 % et 30,2 %. Difficile, dans ce cas, de placer l’un devant l’autre. Attention aussi à être attentif à l’évolution d’un chiffre : comparer sur la durée en dit plus que se focaliser sur un seul résultat.

Différencier les questions posées

Pendant les périodes d’élections, plusieurs sondages cohabitent, et tous ne disent pas la même chose. Il y a les sondages de popularité (« Est-ce que vous appréciez tel candidat ? »), les sondages d’intentions de vote (« Si l’élection avait lieu demain, est-ce que vous voteriez pour tel candidat ? »), ou encore les souhaits de victoire (« Souhaitez-vous que tel candidat soit président de la République ? »)... Il faut donc bien être attentif à la formulation précise de la question posée.

Avoir une vue d’ensemble sur les choix proposés

Il faut aussi faire attention aux hypothèses présentées. Dans le cas d’un sondage d’intentions de vote, est-ce que tous les candidats sérieux sont testés ? Les deux candidats testés pour le deuxième tour ont-ils des chances d’être qualifiés au premier ? Ces hypothèses peuvent parfois être proposées pour provoquer des coups médiatiques ou influencer la campagne. En effet, les sondages sont commandés et payés par des médias ou des partis politiques. Les médias commandent des sondages à la fois pour connaître « l’opinion française », mais aussi en espérant des reprises, et donc de la publicité. Certains commanditaires de sondages, par exemple, veulent être les premiers à tester un candidat potentiel. Des sondages ont aussi testé l’hypothèse de présence de certains candidats au second tour, alors que selon les intentions de vote du premier tour exprimées par des sondages, ces candidats n’ont a priori aucune chance d’y être qualifiés.

Alexandre Léchenet, data-journaliste

Ressources

  • CHAMPAGNE, Patrick.
    Faire l’opinion. Éditions de Minuit, 2015.
  • MICHEAU, Frédéric.
    La prophétie électorale. les sondages et le vote. Éditions du Cerf, 2018.

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